Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Dette publique : comprendre la crise et riposter (5)

Argumentaire 11

   Propositions pour une autre utilisation de l’euro, de la BCE et du crédit

Ni «euro-obligations», ni sortie de l’euro...

Sortir de l’euro ferait redoubler les difficultés et la spéculation, exacerberait les rivalités entre Européens et, au total, consoli- derait la domination mondiale du dollar, pourtant elle-même en crise très profonde. Surtout, cela reviendrait à se priver de la force d’une création monétaire commune à l’échelle européenne, donc des conditions de financement qui seraient très limitées par rapport à des pays-continents comme les États-Unis ou la Chine.

Les euro-obligations, dont la conception s’inscrit toujours dans le recours aux marchés financiers, présentent deux autres inconvé- nients. D’une part elles interdisent la possibilité de conduire des politiques différenciées selon les besoins propres de chaque pays. D’autre part, émises au nom de la zone euro, elles imposeraient, pour garder leur notation, aux pays les plus faibles de s’aligner sur les normes des pays qui dominent, Allemagne en tête, poussant ainsi vers une politique budgétaire unique et vers une montée du fédéralisme dominé par les États et les groupes dominants.

Tout au contraire, l’enjeu est de commencer à rompre avec cette logique qui consiste à faire accumuler de nouvelles dettes, pour tenter de régler celles en cours, en empruntant toujours plus sur les marchés financiers.

Utiliser l’euro et la BCE autrement

C’est possible avec une autre utilisation de l’euro, de la création monétaire de la BCE, du crédit bancaire, des fonds publics na- tionaux et européens. Le PCF, le Front de gauche, et le Parti de la gauche européenne (PGE) proposent de construire un Fonds social et solidaire pour le développement européen.

Son principe : l’émission des titres nationaux de dette publique rachetés par la BCE à un taux d’intérêt nul pour alimenter ce nouveau Fonds. Celui-ci serait chargé de les répartir, démocratiquement, entre chaque pays, selon leurs besoins respectifs, dans le but, expressément, de développer leurs services publics et leur potentiel de croissance sociale nouvelle.

La dénonciation du pacte de stabilité, le rejet déterminé du pacte de l’euro +, marcheraient alors de pair avec le lancement d’un nouveau pacte pour une croissance sociale, écologique et solidaire européenne.

Redonner une pleine utilité à la création monétaire et au crédit

Pour y parvenir nous avançons un ensemble cohérent de propositions :

- Réorienter la politique monétaire de la BCE sous le contrôle des parlements européen et nationaux.

- Redonner aux banques centrales la possibilité de financer directement les États, soit par des avances monétaires directes, soit par la souscription d’obligations du Trésor à bas taux d’intérêt.

- Différencier les taux d’intérêt (des banques commerciales vers les ménages et les entreprises, et de la Banque centrale vers les banques commerciales) selon l’utilité sociale effective de l’activité à financer ou refinancer.

- Revenir sur le décloisonnement banque de dépôts/banque d’investissement et interdire certaines pratiques comme les opérations de «gré à gré».

- Réinventer une maîtrise publique et sociale du système bancaire et d’assurances.

- Revenir sur la libre circulation des capitaux et instaurer une taxe sur les transactions financières.

- Réorienter le crédit vers l’économie réelle, en privilégiant les activités socialement et écologiquement efficaces, pour permettre un nou- veau type de développement pour générer des richesses indispensables pour retrouver des recettes publiques, des revenus populaires, et les moyens de répondre aux besoins sociaux, en premier lieu d’emplois.

Une telle réorientation de la création monétaire et du crédit à l’économie peut contribuer à maîtriser et résoudre le problème de la dette, sans les «cures d’austérité» qui saignent les peuples sans guérir l’économie. Il faut organiser un dégonflement de sphère financière.

Une affaire mondiale et pas seulement européenne

Il faut en finir avec la dictature des agences de notation privées pour le compte des marchés financiers et la spéculation.  Cela nécessite une profonde transformation du système monétaire international dans le cadre d’une nouvelle conférence mondiale qui serait au moins de la portée de celle de Bretton Woods de 1944.

L’Europe peut jouer un rôle majeur dans ce sens, de concert avec sa propre transformation :

- En se tournant vers les besoins énormes de développement  du monde arabe en révolution et de l’Afrique sub-Sahara avec un nouveau plan de type Marshall sans domination.

- En se rapprochant des pays émergents pour faire reculer le rôle du dollar et aller vers la création d’une monnaie commune mon- diale de coopération, à partir des droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI, comme l’envisagent désormais explicitement la Chine, la Russie, la CNUCED... et d’une refondation des institutions monétaires, financières et commerciales internationales.

 

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