Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Les PPP : Politique industrielle fausse réponse au besoin de financement local

Malgré un bilan mitigé, les contrats de partenariat bénéficient d’une forte impulsion politique. Leur contexte juridique et procédural, comme leur périmètre, ont été desserrés. Face à une double contrainte de tension sur les finances publiques et de besoins d’investissements critiques dans des secteurs clés, il s’agit de forcer l’intervention privée dans la gestion de secteurs publics dont les marchés présentent de forts potentiels de croissance pour les opérateurs. Le recours au partenariat public-privé (PPP) doit devenir la règle, en dépit des risques qu’il

Ce procédé, inauguré en France en 2008, restaure, en réalité, la formule du METP (Marché d’entreprises de travaux publics) issue d’une jurisprudence du Conseil d’État de 1963 reniée par le Code des Marchés publics de 2001.

Il prétend permettre de surmonter les contraintes de rationnement pesant sur le financement public (pacte de stabilité…) en associant un « partenaire » privé au financement d’équipements publics lourds.

Dans ce type de « partenariat »  le(s) partenaire(s) privé(s) – généralement de très grands groupes multinationaux – peuvent imposer un rapport « rentabilité-risque »  des investissements à réaliser et de leur maintenance qui peuvent conduire à des prélèvements financiers très accrus sur les populations et les collectivités publiques,  ainsi qu’à de graves reculs de la maîtrise publique et sociale, donc de la démocratie.

D’ailleurs d’importantes études, conduites au Canada (1) notamment, ont mis en évidence les surcoûts considérables ainsi engendrés pour la collectivité, sans parler du risque de délabrement des infrastructures quand l’évolution de la situation, après signature du contrat de « partenariat », laisse entrevoir  une dégradation de l’espérance de rentabilité financière relativement aux risques.

Le Conseil constitutionnel, en France, a admis la constitutionnalité de ce qui est présenté seulement comme « une nouvelle technique de financement permettant aux acteurs publics de ne pas avoir à recourir directement procédure très pointue, les élus territoriaux  sont obligés de faire appel aux services très coûteux de cabinets privés de conseils.

Cependant, il a expressément considéré que les PPP constituent des dérogations au droit commun de la commande publique et à celui de la domanialité publique, soulignant que ce caractère dérogatoire pouvait être reconnu  dans les cas d’« urgence » ou de « complexité » (2). C’est dire…                                                                            

On peut aussi observer que plus le « partenaire » public est petit (par exemple une collectivité locale) et plus le « partenaire  » privé peut imposer des conditions prédatrices, d’autant que, souvent, pour disposer de l’expertise financière permettant de négocier ce type de procédure très pointue, les élus territoriaux  sont obligés de faire appel aux services très coûteux de cabinets privés de conseils.

L’hôte de l’Élysée, sous prétexte de relancer l’investissement public et, assure-t-il, la croissance, tout en continuant à rationner la dépense publique et sociale, prétend faire ainsi reculer les contraintes  au nom d’objectifs, présentés comme audacieux, d’implication de grands groupes industriels privés dans la réalisation de chantiers d’intérêt public. Cela a pu, sans doute, illusionner un temps… mais, désormais, apparaissent de graves déconvenues et gâchis (3).

Cela étant, il y a un défi qui doit être relevé et appelle des luttes nouvelles. Il concerne l’exigence de nouveaux financements volumineux, très peu coûteux et stables de l’investissement public – avec les nécessaires dépenses de formation très importantes qu’ils impliquent – émancipés du marché financier et des exigences de rentabilité financière. Cela renvoie à la nécessité d’une nouvelle mobilisation de l’appareil de crédit et des banques, avec de nouveaux critères de financement et de gestion de ces investissements,  jusqu’à la BEI et à la BCE. Il concerne aussi l’exigence d’une responsabilité sociale des entreprises sur les territoires en liaison avec une promotion forte des services publics. Il concerne encore la recherche d’une nouvelle efficacité du financement  public avec une maîtrise sociale, et pas seulement de type étatique.

(1) La Fédération canadienne des municipalités a publié le 30 août

2007 une étude exhaustive sur le fonctionnement et l’efficacité des partenariats public-privé (PPP) ; cf. Hamel P.-J. : « Les partenariats public-privé (PPP) et les municipalités : au-delà des principes, un bref survol des pratiques », INRS-GRIM, Université de Québec, 112 p. On peut aussi consulter Laimé M. : « Les partenariats public-privé sont nuisibles et minent la démocratie », Carnets de l’eau, les blogs du Diplo, 8 septembre 2007.

(2) Décision n° 2009-575 DC du 12 février 2009.

(3) L’exemple de l’hôpital d’Évry-Corbeil est sans doute l’un des plus parlants. Infra, p. 28.

 

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