Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Les banques et la BCE au cœur de la bataille des peuples

Editorial

Il faut partir de la gravité de la crise financière en Europe.

Cela a commencé avec la formidable crise financière et des banques en 2008 aux États-Unis et en Europe, suivie de la récession à l’échelle mondiale en 2009. D’où les réponses des soutiens publics des banques et aussi des relances de la croissance à partir des fonds obtenus par les endettements des Etats. Mais on n’a pas changé les critères des banques qui ont relancé leurs activités spéculatives. Tout cela a débouché sur la crise des dettes publiques européennes, avec la spéculation contre ces titres de dettes.  D’autant plus que les dettes avaient grossi considérablement,  en liaison avec les facilités d’endettement en euros des États de la zone, malgré les capacités de remboursements limitées de plusieurs États de la zone, de la Grèce à l’Espagne. D’où  les hausses intolérables  des taux d’intérêt  des nouvelles dettes, pour le remboursement de ces États, et les interventions  de fonds européens pour soutenir ces endettements. C’est  la crise de la construction fondée sur l’euro.

Cela a engendré en 2011 de grandes difficultés de plusieurs banques et du crédit bancaire. Car les banques sont fragilisées par la masse de titres de dettes de leur capital, dévalorisés et attaqués par la spéculation. Après la Grèce avec ses 350 milliards d’euros de dettes publiques, l’Italie  est menacée avec1900 milliards d’euros de dettes, tandis que la France en a 1690 milliards.

Les mesures d’austérité imposées   aux peuples, de la Grèce à la France, les limitations des dépenses sociales et des dépenses pour les services publics, soi-disant pour réduire les déficits et l’endettement, tendent en réalité à déprimer la demande. Elles brident la croissance et compriment les recettes fiscales, relançant  les difficultés : 10 % de baisse du PIB en Grèce en 3 ans et une croissance de moins de 1 % en France.

L’austérité et les difficultés du crédit contribuent à la relance du chômage dans l’Union européenne. Le taux de chômage dépasse 21 % en Espagne, presque 10 % en France avec 2,8millions  de chômeurs catégorie A et 4,3 millions toutes catégories. Les services publics, école, santé, logement social, etc., sont attaqués.

Au cœur de la réponse à la crise économique et sociale, de l’alternative à gauche et de l’apport du PCF et du Front de gauche, il y a donc les banques et le financement.

Cela vise de nouveaux objectifs sociaux et nécessite de nouveaux pouvoirs.

Pour la bataille à gauche, il faut partir des contra- dictions du PS. S’appuyer  sur les éléments positifs pour les développer contre les éléments négatifs qui prédominent.

D’un  côté, dans le débat des primaires du PS, ont avancé des exigences de contrôle public des banques. Mais en contradiction, d’un autre côté, ce qui prédomine c’est l’obsession de la réduction du déficit et de la dette publics, et donc des dépenses publiques, en surenchère avec Sarkozy.

L’objectif serait de réduire la part du déficit public dans le PIB à 3 % en 2013 (actuellement presque 6 %) et 0 % en 2017 !

Le recours aux mesures d’austérité pour réduire les dépenses sociales est renforcé sous la pression des marchés financiers. Ainsi la France est menacée par l’agence de notation Moody’s de la dégradation de sa note AAA. Cette dégradation entraînerait une augmentation des intérêts à payer, dont le taux passerait de 3 % à 4,5 % et de 50 milliards à 70 ou 75 milliards d’euros.

Les propositions  alternatives doivent être articulées aux luttes sociales dans les entreprises,  les services publics, les collectivités territoriales.

Dans le PS sont certes montées les idées d’un contrôle public des banques, avec des représentants de l’État dans leurs conseils d’administration, voire leur droit de veto, et de mesures contre la spéculation, pour la séparation entre banques de dépôts et banques d’affaires. Mais persistent de grandes insuffisances sur l’importance du contrôle public des banques, et surtout le vague sur un autre comportement des banques et un autre crédit.

Les mesures du sommet européen le 27 octobre, pourraient entraîner un répit provisoire, mais les graves problèmes ne seraient pas résolus. Outre le soutien conditionnel à la Grèce, ce sont :

 100 milliards d’euros, la moitié de la dette publique grecque dans les banques, non remboursés. C’est une partie limitée des 350 milliards de dette, sans compter les risques pour les autres pays, comme l’Italie.

 des recapitalisations des banques, une augmentation de leurs fonds propres de 106 milliards d’euros, mais en comptant sur leurs profits, et sans changement de leurs critères.

 le Fonds européen de stabilité financière (FESF) à la capacité portée à 1000 milliards d’euros, au lieu de 440 milliards, mais à partir des marchés financiers et avec des garanties des États, tout particulièrement de l’Allemagne et de la France.

Contre l’austérité  renforcée, une renégociation est souhaitable.

Nous avions proposé que la prise de dettes par la BCE soit amplifiée, au lieu d’être remplacée ultérieurement par le Fonds de stabilité. Finalement Sarkozy avait dû avancer l’idée d’un appel du FESF à la BCE, mais cela s’est heurté à l’opposition de Merkel et il s’est incliné. Désormais Hollande lui-même a dû revendiquer cette intervention de la BCE, quoiqu’uniquement pour sou- tenir les dettes et non aussi pour le progrès social.

Au G20, un recours aux Droits de Tirage Spéciaux (DTS) du FMI pour appuyer le FESF a été décidé.

Les propositions du PCF et du Front de gauche concernent :

1. Un Pôle public financier en France. Il participerait à une incitation et à un contrôle public des banques. Face au défi de recapitalisation, des prises de participations et certaines nationalisations, avec de nouveaux pouvoirs, contribueraient à un pôle public financier, également adossé à la Caisse des dépôts, la Banque postale,  les Caisses  d’épargne, les banques mutualistes.

En outre, nous proposons des mesures de taxation des banques et une mutualisation des garanties entre elles. Ce pôle, directement et par coopération avec toutes les banques, inciterait à un autre type de crédit : une baisse sélective des taux d’intérêt, jusqu’à zéro (voire négatifs avec une diminution des remboursements), pour des crédits aux entreprises, avec des taux d’intérêt d’autant plus abaissés que sont programmés emplois et formations, et une efficacité des investissements avec recherche et formation.

2. Un refinancement des banques par la BCE, pour le nouveau crédit. Cela implique de nouvelles missions pour la BCE (croissance, emploi, et non priorité à la lutte contre l’inflation), et son contrôle public démocratique.

Le 3 novembre, le taux de refinancement de la BCE pour les banques a été abaissé de 1,5 à 1,25 % mais sans conditions, et éventuellement pour la spéculation.

Il faut faire comprendre la force formidable de la création monétaire de la Banque Centrale. Si la création monétaire  favorise les salaires, l’emploi, la production réelle, elle ne développe pas l’inflation.

Il s’agit  aussi de rompre avec l’obsession libérale   de la réduction des déficits et des dettes. Il peut exister une bonne dette pour favoriser un nouveau type de croissance fondé sur la progression de l’emploi et des services publics.

3 Une création monétaire par la BCE pour développer sa prise de titres de dettes publiques européennes des États en difficultés.

Au contraire, le FESF s’appuie sur les marchés financiers et sur les garanties des États, avec la dépendance des marchés et leurs pressions.

4. Une prise de titres de dette publique par la BCE pour le progrès social. Cela alimenterait un « Fonds européen de développement social et écologique », pour l’expansion des services publics. Cette proposition du

PCF a été reprise par le Parti de la Gauche Européenne (PGE). Cela se rapproche des propositions des forces syndicales et de gauche en Allemagne pour une Banque publique.C’est dire l’importance de la bataille pour une autre utilisation de la BCE et de l’euro.

Il ne s’agit pas de la fuir, avec la proposition de sortir de l’euro, de Marine Le Pen ou de certains à l’extrême gauche, qui est dangereuse :

-Elle entraînerait une dévaluation des monnaies nationales et la montée des dettes publiques, la pression renforcée contre les salaires, les dépenses sociales et la croissance.

‒ On se priverait de la force de la création monétaire en Europe, à partir d’une base réelle large et de solidarités.

‒ On renforcerait la domination mondiale du dollar, au lieu de l’appui de l’euro pour un autre FMI, avec une monnaie commune mondiale émancipée de la domination du dollar, pour une autre mondialisation de progrès social.

Cependant, devant les luttes dans les pays concernés, à commencer par la Grèce malgré le rejet du référendum, de nouvelles négociations seraient possibles pour modifier les mesures, en prenant en compte les exigences sociales.

Nous visons l’articulation  entre nouveaux moyens financiers, objectifs sociaux, pouvoirs.

Une construction nouvelle de l’Union européenne, de démocratie participative, sociale, internationaliste, dans une Confédération, peut s’opposer  au fédéralisme d’une gouvernance européenne de domination du couple franco-allemand où l’emporterait d’ailleurs l’Allemagne. Il faut maîtriser et commencer à dépasser les marchés : de la monnaie et de la finance ; du travail, en avançant vers une sécurisation de l’emploi et de la formation ; des productions, avec de nouveaux critères de gestion des entreprises, pouvoirs des salariés, politique industrielle ; du marché mondial, avec des coopérations de réciprocité et des taxes, protégeant contre les concurrences destructrices et les délocalisations.

Une autre mondialisation est possible, également avec un autre euro. Une véritable coopération euro- méditerranée avec l’enjeu de démocratisation dans les pays arabes,  s’appuierait sur une sorte de plan Marshall, avec des dons en euros aux banques centrales de ces pays, pour des achats aux pays de l’Union européenne, afin de favoriser croissance et emploi des deux côtés.

Une autre coopération  est possible avec les Pays émergents. La Chine propose de participer au FESF et elle a déjà pris des dettes européennes. En négociant de nouveaux rapports, il ne s’agit pas de s’y opposer comme le fait le PS. La Chine tend d’ailleurs à s’émanciper du dollar. Et elle a repris nos propositions d’une nouvelle monnaie commune mondiale émancipée du dollar, à partir des DTS du FMI. Cela permettrait un refinancement des banques centrales elles-mêmes, pour un autre crédit partout. Et aussi la prise de titres de dette publique par le FMI, pour les services publics, au plan mondial, avec des biens ou services publics et communs de toute l’humanité. 

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