Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Remettre l’impôt à sa juste place

La scène politique est régulièrement alimentée depuis quelques mois par le débat fiscal.

Il est juste de s’interroger sur les choix persistants de la majorité actuelle, qui consistent à faire baisser les impôts des riches et des entreprises tout en augmentant la pression fiscale  sur les revenus bas et moyens et en réduisant les missions et les services publics afin de répondre aux exigences des marchés visant à transférer les prélèvements sociaux sur la richesse créée vers les prélèvements financiers. Ainsi, les collectivités territoriales dont chacun mesure le rôle indispensable dans la chaîne des solidarités entre les citoyens, les générations, les territoires, sont aujourd’hui mises à contribution au même titre que les services de l’État.

Changer l’impôt devient une évidence. Pour cela, il faut une profonde réforme fiscale. Sur ce point, il y a un constat commun à gauche. Mais là où les positions divergent  c’est sur la nature des réponses à apporter. Une question est particulièrement sensible. Il s’agit de la place et du rôle d’une réforme fiscale dans un ensemble de mesures nouvelles de politique économique. Celles-ci incluraient notamment les questions du rôle du crédit et de l’intervention populaire, soit par conséquent, une évolution profonde de la BCE. Cela exigerait aussi la définition de nouvelles règles de gestion des entreprises avec des droits et des pouvoirs nouveaux d’intervention des salariés.

Au registre des inquiétudes soulevées à gauche figure le projet de réforme fiscale du Parti socialiste, qui a une fâcheuse tendance à faire croire que, pour l’essentiel, une réforme de la fiscalité concerne le seul impôt sur le revenu.

Une critique du projet de réforme fiscale du PS

Une réforme de l’impôt sur le revenu, oui mais quelle réforme ?

Certes il faut réformer l’impôt sur le revenu mais pour le rendre réellement plus progressif en ajoutant des tranches, en élevant son barème et en élargissant son assiette au-delà des revenus du travail, aux revenus du capital. En guise de réponse à cette problématique il suffirait pour certains de fusionner l’impôt sur le revenu et la CSG.

Le danger de la proposition de fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG

Cette fusion signifierait l’engagement d’un processus de fiscalisation du budget de la protection  sociale tendant à en changer l’assiette et à en exonérer les entreprises. Alors que le financement de la sécurité sociale doit être assis sur la richesse créée et calculé sur la masse salariale. Alors encore, que la gestion de la sécurité sociale doit revenir aux salariés et non à l’Assemblée nationale conformément aux orientations du Conseil national de la résistance, et surtout pour répondre aux enjeux actuels d’une dynamique du financement de la protection  sociale et de pouvoirs nouveaux des salariés dans la gestion de la sécu, comme des entreprises. Enfin rappelons que les entreprises  sont  totalement exclues de la CSG. Pour compléter le tableau, un projet de retenue à la source est avancé. Derrière un motif technique, ce procédé ouvre subrepticement la voie au contournement du principe du quotient familial qui est la référence de calcul des prestations familiales, préfigurant ainsi une remise en cause de la politique familiale et s’attaquant du même coup à un autre volet de la solidarité nationale. Est-ce ainsi qu’on combattra une politique de droite ?

Face à l’offensive politico-médiatique  menée sur le thème de la réforme de l’impôt sur le revenu, il est à se demander  si l’objectif d’une telle campagne ne consiste pas finalement à consacrer une réforme de structure des prélèvements sociaux (protection sociale) et, sous prétexte d’une plus grande justice et d’une meilleure redistribution, de soumettre le financement de la protection sociale à l’impôt des personnes. Ainsi un pas supplémentaire serait franchi dans la déresponsabilisation sociale des entreprises en même temps que s’ouvrirait une nouvelle ère d’injustice faisant voler en éclats un des principes fondateurs de la protection sociale : « chacun contribue en fonction de ses moyens  et reçoit en fonction de ses besoins ». En effet, avec la fusion IR-CSG les moins fortunés  seraient mis à contribution en attendant que ne se profilent des seuils différents de prise en charge selon les capacités contributives  de chacun, notamment par le recours à des assurances privées.

Nos propositions de réforme de la fiscalité

Réformer la fiscalité c’est en faire un outil de lutte contre les prélèvements  financiers.

Au-delà de l’impôt sur le revenu, une réforme fiscale efficace implique la mise en œuvre d’un dispositif de modulation de la fiscalité des entreprises, c’est-à-dire là où se crée la richesse, sanctionnant un détournement de plus en plus massif du produit de l’activité créatrice vers la finance et les marchés. Ainsi nous proposons une nouvelle fiscalité des entreprises, du capital et de la fortune. Une fiscalité qui incite à l’investissement utile par une modulation des taux selon les efforts consentis en matière d’emplois, de formation, de respect des normes environnementales et luttant contre les énormes gâchis capitalistes qu’ils soient financiers, humains ou matériels.

Pour cela, un nouvel impôt sur les sociétés verrait le jour. D’un rapport plus important, progressif et modulé (en moins comme en plus) l’objectif recherché serait de pénaliser les entreprises qui investissent pour diminuer l’emploi et la masse salariale, choisissant les placements financiers et la distribution de toujours plus de dividendes. Par contre cet impôt encouragerait les entreprises qui investissent dans les créations d’emplois, et des formations de qualité.

Il conviendrait de même de reconstruire une nouvelle taxe professionnelle.  Un impôt local sur le capital des entreprises est une nécessité pour en dissuader les gâchis : Cette « taxe professionnelle » moderne serait assise sur les équipements  des entreprises (mobiliers et immobiliers), ainsi que sur les actifs financiers des sociétés et des banques. Les collectivités territoriales disposeraient de quelque 20 milliards d’euros supplémentaires  et verraient ainsi l’emploi progresser sur leur territoire, ce qui augmenterait la base de leurs recettes futures, et leur permettrait de freiner leur endettement auprès des banques ou des marchés financiers.

Enfin il faut une réforme de l’impôt sur les grandes fortunes. Il s’agit d’en accroître le rendement, no seulement en augmentant son barème, mais aussi en élargissant sa base. On pourrait aussi faire contribuer les fortunes professionnelles de façon modulée, selon que les entreprises concernées augmentent ou non l’emploi et la masse salariale, alors qu’aujourd’hui les équipements professionnels sont exonérés de l’ISF. Cette réforme annulerait  les effets des dernières dispositions prises et aboutissant pour 143 des 190 plus grosses fortunes à diviser par 6 (275 000 euros au lieu de 1,676 million d’euros) leur cotisation.

Une réforme de la fiscalité efficace et juste suppose de se fixer quatre objectifs :

 Rétablir la justice fiscale en imposant chacun en fonction de ses capacités contributives  réelles et en sou- mettant à cette nouvelle fiscalité des personnes les revenus du capital au même titre que les revenus du travail.

 Responsabiliser les entreprises en intégrant en matière d’IS, une modulation incitative selon la nature des investissements  réalisés et en créant un véritable impôt local sur le capital. Il s’agit d’impulser  un nouveau mode de production des richesses, luttant contre les gaspillages capitalistes.

 Faire reculer le poids relatif des taxes indirectes (TVA, TIPP) et des impôts locaux personnels (Taxe d’habitation particulièrement)

 Intégrer cette réforme fiscale dans un ensemble de réformes structurelles, notamment une nouvelle poli- tique du crédit et un nouveau rôle des banques, BCE en premier qui doit pouvoir financer directement les activités utiles pour l’homme, par exemple la relance ou la création de services publics. Forme d’une relance saine de la croissance, il en résulterait un élargissement de l’assiette des impôts donc une augmentation des recettes budgétaires, vrai atout pour réduire la dette.

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