Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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La « flexicurité », un paradigme social-libéral qui se voulait modèle

Allant au-delà des politiques d’activation du marché du travail de la fin des années 1990, le concept de « flexicurité » est né aux Pays-Bas en 1995 pour porter la proposition d’une politique de l’emploi basée sur un compromis entre flexibilité et sécurité. Rapidement, l’expérience du « Triangle d’Or » danois a donné force et crédibilité au concept, invitant les autorités européennes à en encourager dès 1997 la diffusion.

Au milieu des années 2000, ce nouveau paradigme des politiques de l’emploi a acquis une grande visibilité en Europe, inspirant nombre d’expérimentations et prétendant parfois incarner le fameux « modèle social européen ». Mais ce modèle faisant une large place à l’intervention publique semble avoir été durablement  fragilisé par la crise de 2008 et le tour de vis budgétaire  qui s’en est suivi.

Logique néolibérale, préoccupations sociales… relatives !

En tant que volet de la politique de l’emploi (plutôt que de politique sociale), la flexicurité prétend optimiser le fonctionnement du marché du travail, avec l’idée que l’on peut accepter une certaine instabilité des emplois pour peu que les travailleurs réussissent à enchaîner les contrats et évitent, ainsi, de subir des périodes de chômage durable. Dans ce but, il s’agit d’allier  des stratégies de flexibilisation du marché du travail, une organisation du travail « modernisée » et une meilleure protection des travailleurs.

Flexibiliser le marché du travail

Dans une logique néoclassique, le chômage provient des rigidités sur le marché du travail. Pour le résorber, il importe de faciliter l’entrée et la sortie de l’emploi, en levant les barrières au licenciement (l’OCDE mesure en effet la flexibilité au travers de seuls indicateurs de protection de l’emploi), mais également en mettant à disposition des employeurs différents contrats de travail temporaires ou à durée déterminée leur permettant d’embaucher au plus près de leurs besoins (la Commission européenne recommande cependant d’éviter une « prolifération »…). L’emploi salarié à temps plein, stable, avec des « contrats de travail classiques » (par opposition aux contrats atypiques) est jugé inapproprié aux réalités d’un marché du travail mondialisé, et il est recommandé d’en assouplir les règles.

Au-delà des contrats de travail, l’effort de flexibilisation revendiqué touche également, suivant les pays : au temps et conditions de travail, aux formes de représentation et négociation collective, à la rémunération…

Il faut de plus souligner que l’écho reçu par l’exigence de flexibilité répond sans doute infiniment moins à la volonté de réduire le chômage qu’aux exigences de compétitivité et de rendement du capital !

Sécuriser la personne plutôt que l’emploi

En compensation de la fragilisation de l’emploi, la flexicurité recommande des taux de remplacement élevés de l’assurance-chômage, dans une logique de sécurité professionnelle protégeant les individus  plutôt que les emplois.

Le patronat européen combat néanmoins cette approche de sécurisation des parcours professionnels, considérée source d’aléa moral (la protection sociale conduisant les agents à arbitrer en défaveur du travail), et avance que la meilleure sécurité pour le travailleur est de pouvoir réintégrer rapidement le marché du travail (cf. rapport Kok (1)). Le volet « flexibilité », associé éventuellement à une employabilité renforcée, est alors présenté comme le préalable indispensable à une

« sécurité » réelle,  les droits éventuellement reconnus ne peuvent l’être que parallèlement à une responsabilité de recherche active d’emploi dûment contrôlée et la protection de l’employabilité de l’individu doit passer avant la protection de son emploi…

Développer l’employabilité des individus

Le ciment des deux volets flexibilité et sécurité est la mise en place de politiques actives du marché du travail visant à faciliter la transition entre deux emplois ou du chômage à l’emploi.

Dans ce but, le paradigme flexicuritaire recommande le déploiement de politiques actives de soutien à l’employabilité des individus, par l’accompagnement personnalisé des chômeurs, la formation et l’aide à la mobilité et à la transition professionnelle.

Dans ce sens, des services de l’emploi et de la formation professionnelle tout au long de la vie de qualité, « modernisés », sont reconnus comme nécessaires.

Le « modèle » danois

La flexicurité à la danoise est bâtie autour d’un « triangle d’or »:

=  faible protection de l’emploi (licenciements sans contraintes pour l’employeur ni indemnités dans la plupart des cas) ;

=  forte indemnisation du chômage (revenu de remplacement à 90% du salaire pendant 4 ans) ;

=  politique d’activation du marché du travail centrée sur le critère d’employabilité (important effort public pour l’accompagnement des chômeurs et la formation professionnelle, conditionnement du versement de l’indemnité à la recherche active et à l’acceptation des emplois et/ou formations, éventuellement aidés, proposés par les services publics de l’emploi).

Le système d’emploi danois apparaît comme le fruit d’une réforme progressive de la politique de l’emploi initiée en

1993, rendue possible par un cadre institutionnel laissant historiquement une place importante au dialogue social, notamment tripartite, permettant une négociation de chaque mesure à l’aune de l’expérience accumulée des acteurs sociaux. A noter: le licenciement sans contrainte remonte à...1899 !

En 2006, le taux de rotation de la main d’œuvre atteignait 30% et l’ancienneté moyenne d’un salarié dans une entreprise huit ans (respectivement 14% et 11 ans en France), tandis que le taux de chômage était passé de 12,4% en 1993 à 4,5%. Pour autant, le « miracle danois » ne peut être attribué à la seule flexicurité: au-delà du « triangle d’or », des prélèvements obligatoires élevés (le budget de l’Etat atteint 50% du PIB !) et une politique macro- économique qui a permis une relance de la croissance à partir de 1994 sont également à mentionner. Le système de flexicurité lui-même pèse d’un poids budgétaires conséquents: 4,3% du PIB en 2003, dont 2.5 points de dépenses actives (suivi, accompagnement et formation), contre 2.7% et 1 point pour la France.

Avec la crise de 2008, le pilier protection sociale du triangle a été singulièrement affaibli: afin de contenir les déficits publics, le gouvernement danois a réduit en 2010 la durée d’indemnisation de 4 à 2 ans et augmenté le temps travaillé nécessaire pour à 52 entre flexibilité du contrat de travail et sécurité qui se trouvent remis en cause.

Depuis 1997, le paradigme européen pour les politiques de l’emploi

En 1997, l’inclusion d’un titre « Emploi » dans  le traité d’Amsterdam a donné à l’Union Européenne compétence pour coordonner, sans pouvoir contraignant, les politiques nationales en matière d’emploi. Quelques mois plus tôt, le livre vert « Partenariat pour une nouvelle organisation du travail » affichait l’objectif de « réconcilier la sécurité des travailleurs et la flexibilité nécessaire des entreprises ». S’en est suivie la mise en place de la Stratégie Européenne de l’Emploi (SEE), ou « proces- sus du Luxembourg », listant des Lignes Directrices pour l’Emploi (LDE). Les révisions successives de la SEE ont mis l’accent sur le taux d’activité, la mobilité, l’apprentissage tout au long de la vie ou la qualité de l’emploi, mais sans perdre de vue le paradigme flexicuritaire. Ainsi la ligne directrice 2005-2008 n° 21 : « favoriser la flexibilité en la conciliant avec la sécurité de l’emploi et réduire la segmentation du marché du travail, en tenant dûment compte du rôle des partenaires sociaux ».


La Stratégie post-Lisbonne 2000-2010  (projet « Europe 2020 ») entend relancer la coordination des politiques de l’emploi en Europe et précise que les États membres devraient intégrer dans leurs politiques relatives au marché du travail les principes de la flexicurité […] (voir encart), dans  le but d’accroître la participation au marché du travail, de lutter contre la segmentation, l’inactivité et les inégalités  entre  les sexes, et de diminuer le chômage structurel.  Les mesures visant à accroître la flexibilité et la sécurité devraient  non seulement  être équilibrées, mais aussi se renforcer mutuellement.  Les États membres devraient donc mettre en place des contrats « flexibles et fiables », des politiques  actives du marché du travail, un système efficace d’éducation  et de formation tout au long de la vie, des mesures de soutien à la mobilité  professionnelle et des systèmes de sécurité sociale adaptés qui, conjugués, favoriseraient les transitions  professionnelles, en les assortissant de droits et de responsabilités clairs pour les chômeurs en ce qui concerne recherche active d’emploi.

De même, « favoriser la flexicurité » est l’un des axes de l’objectif commun Favoriser l’Emploi du Pacte pour l’Euro porté par Sarkozy et adopté par le Conseil de la zone Euro le 11 mars 2011.

Les huit principes communs de « flexicurité » énoncés par la Commission européenne puis adoptés par le Parlement et le Conseil européen fin 2007 :

1. souplesse et sécurisation des dispositions contractuelles, politiques d’activation, soutien à la formation tout au long de la vie, modernisation des systèmes de sécurité sociale ;

2. équilibre entre droits et responsabilités des employeurs et des travailleurs ;

3. refus d’un modèle unique pour l’ensemble des États membres, la « flexicurité » devant être adaptée aux relations industrielles propres à chaque pays ;

4. réduction de la segmentation du marché du travail ;

5. promotion de la « flexicurité » interne et externe ;

6. soutien de l’égalité entre les hommes et les femmes, afin de permettre une conciliation entre vie professionnelle et vie familiale ;

7. climat de confiance entre pouvoirs publics et partenaires sociaux, afin que chaque partie prenne ses responsabilités ;

8. développement de politiques budgétaires « saines et financièrement viables ».

Une méthode affichée : le compromis et la négociation

Comme nombre de syndicats nationaux, la Confédération européenne des syndicats  (CES) critique sévèrement la version de la flexicurité soutenue par les institutions européennes, sans rejeter pour autant le mot de flexicurité. Ainsi quand, en novembre 2007, le Parlement européen adopte une série de principes de flexicurité plus équilibrés que ceux de la Commission, la CES s’en félicite. John Monks, secrétaire de l’organisation, explique alors que la flexicurité doit viser « à améliorer la sécurité de l’emploi et à compléter la protection de l’emploi par l’investissement dans des transitions professionnelles plus sûres. Elle n’a pas pour but de faciliter le licenciement  des travailleurs. »

Dès l’apparition du concept, son déploiement a été présenté comme devant relever d’une « méthode ouverte de coordination » insistant sur l’implication de tous les acteurs sociaux. Face à la précarité d’un nombre croissant de travailleurs, nombre de syndicats ont vu là une opportunité de négociation pour apporter en particulier plus de sécurité aux titulaires de contrats « atypiques ».

Là où existaient des enceintes de négociation collective de type social-démocrate  fortes, les syndicats ont effectivement pu obtenir quelques avancées pour les travailleurs. Ainsi en Suède, où des accords collectifs régulent le marché du travail, l’accroissement de flexibilité a pu être compensé par un socle de garanties sociales collectives  élevées rejetant l’individualisation des droits prônée par l’ensemble des textes européens, sous le mot d’ordre de refuser ce qui s’apparentait à l’introduction d’une catégorie intermédiaire entre salariés et travailleurs indépendants. En Allemagne, les syndicats ont surtout cherché à faire prévaloir la flexibilité interne sur la flexibilité externe (ajustements du temps de travail plutôt que recours aux contrats précaires), ce qui s’est en particulier traduit par la mise en place d’une flexibilité régulée du temps de travail au travers d’un « compte temps (2) », dont une majorité des travailleurs concernés considèrent qu’il leur a apporté une appréciable autonomie de gestion de leur temps entre travail et vie personnelle.

Hormis ces quelques cas, le déséquilibre  dans le couple fléxibilité/sécurité est très nettement en faveur de la flexibilité,  l’usage rhétorique du terme de flexicurité ayant principalement consisté à imposer la flexibilité aux travailleurs européens contre des promesses bien moins tenues de sécurité, voire en appui d’autres politiques  néolibérales telles que la réduction du nombre de fonctionnaires (exemple de la fusion ANPE- UNEDIC).

Écho important, mises en pratique parcellaires

Malgré l’admiration répétée pour le modèle danois et le soutien marqué des institutions européennes, le développement de la flexicurité n’a connu que des avancées parcellaires.

Il faut d’abord noter que le concept est resté éminemment européen, même s’il a obtenu quelques échos récents dans le débat public aux États-Unis, au Japon et en Australie.

Des expériences ont été menées en particulier autour de l’accompagnement des transitions professionnelles : fondations du travail en Autriche et en Allemagne, Cassa de integrazione Guadagni en Italie, Contrat de Transition Professionnelle en France… Mais toujours de manière ponctuelle et loin de toute approche systémique.

L’explication tient sans doute à l’absence de soutien politique réel Au-delà des objectifs de communication. Le patronat européen, en particulier, s’est montré plus que réservé, craignant que le débat n’aboutisse à une définition européenne du statut du travailleur, qui serait un premier pas vers l’harmonisation du droit du travail. Ainsi selon Ernest-Antoine  Seillière (3), « il n’existe pas un modèle unique de « flexicurité » à mettre en œuvre dans toute l’Union  européenne. Les décisions sur des mesures concrètes ne peuvent  être prises que par les États membres ».

Les Pays-Bas illustrent  en revanche très bien une évolution assez éloignée  du concept initialement forgé dans le pays : au nom de la flexicurité, les salariés sous contrats atypiques, intérims et contrats précaires, déjà vulnérables, ont subi des exigences réglementaires ou managériales de flexibilité croissantes (temps et horaires de travail, salaires variables…), permettant aux salariés « insiders » de maintenir voire améliorer leur sécurité dans l’emploi. Des évolutions semblables ont eu lieu partout en Europe, particulièrement en Belgique et en France, résultant en une segmentation généralisée des marchés du travail.

 

Face à la crise de 2008, explosion du modèle

Du point de vue des « modèles » de politique de l’emploi, la crise de 2008 modifie le diagnostic porté antérieurement sur le succès conjoint des pays libéraux et nordiques, et le prétendu échec des pays continentaux. La dégradation du marché du travail, d’autant  plus violente que le niveau de flexibilité est élevé, entraîne une augmentation des indemnisations du chômage, alors même que les programmes  d’activation de type flexicurité sont déjà très coûteux. Dans l’idéologie de l’État modeste et face à la pression des marchés financiers sur les dettes publiques, le poids financier d’un système de flexicurité pour la puissance publique devient très élevé, et s’est avéré intenable pour le Danemark, qui a annoncé début 2010 une politique de rigueur remettant en cause, d’après les syndicats et la gauche danoise, les fondements même du compromis flexicuritaire (voir encadré). De fait, l’une des limites fortes du modèle apparue dans la crise est l’absence de responsabilité des employeurs dans le système d’emploi, puisque tous les risques et coûts sont partagés entre les salariés et la puissance publique.

Dans les mesures adoptées depuis 2007, on note une poursuite des logiques d’activation, sans réforme majeure des modèles existants en Europe, mais le modèle de la flexicurité semble affaibli. Il faut toutefois relever l’existence de débats très importants dans certains nouveaux pays membres (Pologne, Bulgarie, Roumanie…), sur l’assurance-chômage, la protection de l’emploi par le chômage partiel, le salaire minimum ..., qui semblent les éloigner des tendances néolibérales qui les ont caractérisés depuis leur intégration dans l’Union européenne.      

Que doit-on garder de l’épisode flexicurité ?

Les thuriféraires  bien intentionnés du concept de flexicurité, d’inspiration profondément social-libérale, ont négligé de prendre en compte  les rapports  de force. Aussi dans une période marquée par la faiblesse historique des salariés, le paradigme a servi plus souvent d’argument pour précariser que pour sécuriser. Pourtant, même si la flexicurité diffère fondamentalement  de la Sécurité Sociale Professionnelle  (en particulier en ce que la sécurité n’est visée que dans la transition et non dans l’emploi) et plus encore de la Sécurité d’Emploi ou de Formation (SEF) défendue par le PCF, et malgré l’affaissement du « modèle » danois, elle a pu participer à ouvrir des brèches intellectuelles pour pousser ces concepts dans la bataille des idées, et certains de ses aspects pourraient sans doute être utilement revisités.

Des droits attachés à la personne plutôt qu’à l’emploi

Si l’innovation est plus ancienne (cas des allocations familiales en France : cotisations sur les salaires, droits indépendants du poste de travail), l’idée de transférabilité des droits et l’attention portée aux transitions professionnelles ont eu grâce à la flexicurité de larges échos, permettant notamment à la CGT de mettre en avant sa proposition  de sécurité sociale professionnelle (le projet étant repris par Sarkozy en 2007… pour être bien vite abandonné). Certains auteurs européens ont recommandé d’orienter le modèle flexicuritaire vers une prise en compte des besoins différenciés des différentes étapes de la vie des individus (perspective du « life-course »). Le modèle de SEF défendu par le PCF s’inscrit dans cette logique et va Au-delà, puisque en créant les conditions de l’éradication du chômage il permet d’avancer vers des parcours professionnels réellement choisis.

L’exigence de formation tout au long de la vie

L’inscription dans la stratégie de Lisbonne (« économie de la connaissance ») a mis en avant les enjeux liés au développement de la formation tout au long de la vie. Dans l’approche libérale du concept, il ne s’agissait que de soutenir l’employabilité des salariés et dans la pratique les résultats concrets de ces prises de position en terme d’offre de formation, de reconnaissance des qualifications ou de capacités d’anticipation des besoins de qualification se font toujours attendre. Il n’empê- che que dans l’objectif de mettre en place un système de SEF, la visibilité donnée au volet formation peut s’avérer un point d’ancrage tactique solide.

La notion même de modèle

La manière dont le cadre européen a permis à un concept développé dans un cadre national de devenir un paradigme d’action à l’échelle de l’Union Européenne illustre le vide intellectuel et politique entourant la notion de « modèle social européen ». De par ses contradictions propres, il semble aujourd’hui évident que la flexicurité ne peut constituer ce modèle. La porte semble donc ouverte aux forces progressistes européennes pour pousser ensemble un modèle réellement émancipateur.

                                                                                     

(1) Rapport du groupe de haut niveau présidé par le travailliste néerlandais Wim KOK (novembre 2004) sur la croissance et l’emploi dans l’UE

(2) Près de la moitié de la population active allemande dispose désormais d’une marge de manœuvre formelle sur la détermination du début  et de la fin de son travail quotidien.  L’appréciation  positive de la mesure est à nuancer par le fait que la satisfaction des travailleurs impactés dépend largement des fonctionnements d’entreprises, et en particulier de la puissance des  représentants du personnel.

(3) Ancien président du MEDEF puis de l’UNICE (Union des confédérations de l’industrie et des employeurs d’Europe), devenue BusinessEurope.

 

 

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