Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Riposter à Sarkozy avec la novation communiste

le 11 septembre 2007

Nicolas Sarkozy veut une « union sacrée » des Français pour la rentabilité financière en essayant de faire de la compétitivité, par la baisse du « coût du travail », la grande obsession du pays.

Le défi est de taille, le chef de l'Etat n'ayant pas hésité à reprendre en paroles des formules chères au mouvement syndical, mais aussi à la gauche, comme la « sécurisation des parcours professionnels ».

A l'université d'été du MEDEF, il a prétendu qu'il attendait des négociations syndicats/patronat sur la « modernisation du marché du travail » : « Plus de liberté et de prévisibilité pour l'employeur et, au bout du compte, plus de protection pour le salarié ».

Or, après l'échec du CPE, il est favorable à l'idée d'un contrat de travail unique qui rapprocherait le CDI du CNE. Cela, prétend-il, mettrait fin à la segmentation du marché du travail. Mais les droits et protections contre les licenciements, censés progresser avec le temps, seraient nuls ou extrêmement faibles les premières années, tandis que ce contrat pourrait être systématiquement rompu à ce moment. On introduirait la précarité du CDD dans la CDI.

N. Sarkozy a répété « à quel point (il est) favorable à ce que soit ouverte la possibilité d'une séparation à l'amiable (entre salariés et employeurs) ». En fait, la « séparation » se ferait sans protection de la loi, selon le bon vouloir des patrons.

Les salariés rejetés, dit-on, seraient pris en charge comme « stagiaires » par un nouveau service public de l'emploi qui entretiendrait leur « employabilité » pendant un certain temps, sans aucune garantie, bien sûr, de retour à l'emploi choisi et de non-déclassementt. Pour cela, les « réseaux opérationnels » de l'ANPE et de l'UNEDIC seraient fusionnés pour faire pression sur les conditions d'embauche : Les chômeurs seraient contraints d'accepter n'importe quel emploi peu payé.

Un tel recul du droit du travail entraînerait une déresponsabilisation sociale accrue des entreprises. Cela faciliterait leur fuite en avant dans les opérations financières, les gâchis d'équipements avec l'insuffisance de formation, les délocalisations et restructurations contre l'emploi et la croissance réelle.

N. Sarkozy a menacé de faire légiférer par le gouvernement si les négociations ne débouchent pas d'ici à la fin décembre 2007.

Parallèlement, trois conférences sociales tripartites sont lancées. A chaque fois, les meilleures intentions sont proclamées : améliorer les conditions de travail, préserver le pouvoir d'achat, instaurer l'égalité professionnelle et salariale hommes-femmes.

En réalité, il s'agit de tenter de diviser et d'isoler les syndicats pour imposer de nouveaux abaissements du coût salarial de l'emploi avec des reculs du droit, des baisses de cotisations sociales.

N. Sarkozy a aussi confié à J.Attali, ancien conseiller spécial de Mitterrand, la présidence d'une commission « sur la libération de la croissance ». Elle devra faire des propositions pour « retrouver le plein emploi ». Il s'agit, notamment, de « libérer le travail » car « si on a plus de chômeurs que les autres c'est parce qu'on travaille moins que les autres » a asséné le chef de l'Etat. En cible, les seniors, les jeunes et un rallongement de la durée du travail sur toute la vie.

Face à ces défis, nous pouvons nous saisir, pour des contre propositions, de la maquette pour une « proposition de loi de sécurisation de l'emploi et de la formation » issue des Assises régionales et nationale du PCF au printemps dernier1.

Le chef de l'Etat agite la promesse du « retour au plein emploi », c'est à dire, non l'emploi pour tous et la disparition du chômage, mais sa perpétuation, avec un taux officiel ramené à 5-6% (plus d'un million de chômeurs). Cela signifierait une énorme précarisation de l'emploi et une pression très forte sur le taux de salaire.

Au contraire, il s'agit de viser une éradication, progressive mais effective, du chômage. Et cela avec une véritable sécurité pour tous avec une mobilité de promotion dans la sécurité des revenus et des activités, pour améliorer la qualification et les emplois.

Face aux efforts pour instaurer une « flexisécurité » impliquant une précarisation toujours accrue pour les salariés, il s'agit d'engager un contre-processus de sécurisation sociale des emplois et des formations avec de bons revenus d'activité, à l'opposé de petites aides sociales. Et cela en partant précisément des différentes situations concrètes de privation d'emploi ou de précarité.

L'exigence de ces objectifs sociaux alternatifs doit s'articuler à la bataille pour les services publics, avec de nouvelles valeurs de partage, vers une autre civilisation.

Surtout, il faut des pouvoirs pour les travailleurs et des moyens financiers.

La crise financière aiguise le besoin de changements profonds du rôle des banques, du crédit, de la monnaie. L'enjeu d'une réorientation de la Banque centrale revient très fort sur le devant de la scène, en contradiction avec le respect confirmé par Sarkozy de son indépendance au service des capitaux financiers.

Le problème de la maîtrise et de la sélectivité du crédit à l'investissement des entreprises, contre la dictature de la Finance et pour les capacités humaines, est au cœur de la bataille politique de rentrée. C'est nécessaire pour faire reculer les prélèvements capitalistes, stopper les baisses de cotisations sociales patronales et de l'impôt sur le profit pour relancer ces prélèvements publics et sociaux en les réformant.

Enfin, comment prétendre sécuriser les salariés si l'on ne bouscule pas les gestions des entreprises avec de nouveaux critères et des pouvoirs d'intervention et de contre-proposition pour les salariés, à commencer par les entreprises publiques dont il faut stopper la privatisation.

C'est à une mobilisation générale pour sécuriser emploi, formation, revenu et promouvoir les services publics qu'il faut appeler les travailleurs tout en avançant dans un effort de novation profonde du PCF et aussi de toute la gauche. Loin de régresser sur le travail de novation communiste déjà engagé par les propositions, en prétendant que tout serait à réinventer, prenons-le en mains pour le développer dans la riposte à Sarkozy jusqu'à la promotion d'un projet de société alternatif.

Yves DIMICOLI