Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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La stratégie industrielle d’abandon et de terre brûlée : ça suffit !

Voilà en quelques lignes toute une série d’évènements qui viennent de se produire dans la France industrielle dans la toute dernière période (moins d’un an), et qui ne peuvent pas rester sans une dénonciation globale des plus énergiques :

Airbus : décide d’arrêter définitivement la production de l’avion A380. Bien sûr, comme on pouvait s’y attendre, il n’est plus question d’un A380 pour le transport de fret, ni d’une gamme dérivée des premières séries. Cette décision suit de peu la décision concernant le poids respectif des pouvoirs publics de France et d’Allemagne dans le capital de la Société (augmentation de la part allemande et recul de la part française).

Safran : cède la partie correspondant à son activité industrielle relative à la « filière sécurité ». L’heureux bénéficiaire est un Fond d’investissement américain : Advent International. Dans le même temps, la firme française Oberthur est cassée en deux, et la partie Oberthur Technology est cédée à la même firme américaine. C’est ainsi, avec les 2 opérations menées de concert, une filière stratégique qui est bradée. Dans le même temps, le PDG du groupe affirme publiquement vouloir créer 2 établissements sur le territoire français, et dénonce publiquement que les pouvoirs publics font obstacle à cette initiative dans un secteur d’activités indispensables pour l’industrie aéronautique, et affirme que les pouvoirs publics se démènent bien davantage lorsqu’il s’agit de favoriser l’implantation d’une firme étrangère en France.

Air France-KLM : alors que l’État français discute avec la direction du groupe Accor sur les conditions d’une éventuelle cession de la partie du capital qu’il détient dans AIR France, la compagnie vient de connaître une sorte d’OPA inamicale permettant à l’État néerlandais de prendre un ascendant capitalistique, au détriment de l’État français,

Arjowiggins, filiale du groupe Sequana, est démantelée sur décision de la holding, et subit une vente par appartement. En cas de défection du repreneur, Sequana va jusqu’à demander au Tribunal une mise en liquidation judiciaire, y compris pour la partie stratégique que représente l’activité de l’impression de document sécurisés (billets de banque, papiers d’identité sur papier infalsifiable).

– Bien sûr, Alstom, dont la partie énergétique a été cédée au géant américain General Electric, tandis que la partie transport ferroviaire réchappe de justesse à une cession à la firme allemande Siemens.

À noter que si la politique du pouvoir en place, sous la houlette du président Macron, est aux premiers postes pour la stratégie d’abandon, ses prédécesseurs n’ont pas été de reste. Rappelons-nous :

– Les ciments Lafarge se font absorber par la firme Suisse LCIM. Le siège de Lafarge à Paris file en Suisse.

– La firme Technip se fait absorber par la société américaine FMP. Le siège de Technip de La Défense (près de Paris) file à Londres.

La société STMIcroelectronics qui hérite des leaders français Thomson CSF, Thomson SGS, et même STMicroelectronics, passe sous domination suisse, et son siège social file à Plan-Les-Ouatte en Suisse.

Cette succession d’abandons n’est pas le pur fait du hasard. Elle revient à mettre tout le potentiel industriel, sans lequel rien n’est possible en politique, sous la domination d’une coalition patronat – marchés financiers – pouvoirs politiques en sorte que, selon leur vision commune, il devienne totalement impossible d’engager le moindre début d’alternative, qui s’éloigne un tant soit peu des dogmes libéraux en vigueur actuellement pour s’orienter vers une voie européenne de progrès social, écologique, et démocratique.

Nul doute que, dans la mémoire des forces politiques les plus rétrogrades, la vieille antienne « plutôt Hitler que le Front populaire » laisse des traces. L’actualisation, dans le contexte d’aujourd’hui, ne serait-elle pas de profiter du rapport de force actuellement favorable au capital pour prendre toutes les précautions permettant de priver toute velléité d’émancipation démocratique, sociale et environnementale, des moyens économiques dont elle aurait besoin ? En effet, en mettant sous tutelle les pouvoirs de décision des principaux groupes industriels et, en tout cas, en mettant les lieux de pouvoir décisionnel des grands groupes industriels et financiers à l’extérieur du périmètre où peut s’exercer le contrôle citoyen à la Française, ces forces prendraient les devants.

C’est dans ce contexte que se mènent le débat et la bataille électorale avec l’échéance du scrutin de mai prochain. Dans ce contexte de hold-up sur notre potentiel industriel, qui oserait affirmer que l’issue réside dans la sortie de l’Union européenne ?

Il faudrait, si l’on veut bien comprendre les tenants de cette option, accepter de voir les pouvoirs décisionnaires de nos industries partir sous d’autres cieux, et la France ainsi dépecée, tenter de subsister dans un isolationisme mortifère. Ce n’est pas possible : la seule issue réside dans un esprit de résistance, de bataille d’idée, autour de la seule voie possible, le rassemblement des peuples de l’Union européenne leur permettant de recouvrer leurs droits à une véritable appropriation sociale sur les produits de leur travail, sur les moyens de production, de développement et de commercialisation des richesses nouvelles mises sur le marché, les moyens de production et d’échange, appropriation sociale qui intègre les grandes décisions capitalistiques, du fait même de la reproduction du capital, en développant une nouvelle vision de l’entreprise basée sur les dynamiques de coopérations, et non pas sur les relents de la guerre économique et du dumping social. 

STOP À L’HÉMORRAGIE INDUSTRIELLE EN FRANCE !

STOP À LA DÉLOCALISATION DES EMPLOIS CHEZ NOKIA !

Le texte que nous publions ci-dessous est une contribution à un travail en cours avec les communistes
du groupe Nokia (ex Alcatel).

 

Nokia, après avoir piétiné ses engagements lors du rachat d’Alcatel Lucent, veut supprimer 408 emplois dont 353 dans l’Essonne. Avec Ascoval, Ford Blanquefort, Alstom, General Electric ou Fonderies du Poitou… la liste est longue des échecs d’Emmanuel Macron et de son ministre Le Maire sur l’industrie. Pourtant l’argent coule à flots pour la spéculation. Pourtant l’industrie peut s’appuyer sur les savoir-faire très avancés des travailleurs français.

En France, l’industrie ne représente plus que 9 % du PIB contre 20 % en Allemagne, derrière l’Italie (14 %) et même l’Espagne (12 %).

Les fermetures de sites et les restructurations vident certains territoires, détruisent des savoir-faire, mettent des entreprises stratégiques sous tutelle de la finance internationale.

S’attaquer au coût du capital

Au nom de la compétitivité, l’État agit depuis des décennies pour flexibiliser le travail, précariser, faciliter les licenciements. Il subventionne les profits et tire les salaires vers le bas, avec les exonérations de cotisations sociales, le CICE de Hollande et Macron, le Crédit impôt recherche.

En 2017 avec les 73  milliards deuros  de Crédit impôt recherche, Nokia a pu payer la totalité des 71 milliards deuros d’indemnités de licenciements. Ainsi nos impôts ont permis à Nokia de réduire ses emplois en France et de réaliser son objectif d’accroître ses effectifs dans les pays à bas coûts salariaux avec un objectif maintenant de 70 %.

Pourtant, Nokia affirme reconnaître les atouts de la France : écosystème attractif, start-up innovantes, excellence de la formation, compétences et disponibilités des salariés et coût de la R & D réduit. Mais les fonds de pension, notamment américains, qui dominent le capital de Nokia préfèrent négliger ces atouts pour délocaliser les activités dans des pays à bas coûts salariaux. Leur objectif est de baisser la masse salariale et de dégager du cash pour les dividendes à court terme quitte à mettre en danger le développement de l’entreprise à moyen et long terme.

Pour sauvegarder et développer l’industrie et les emplois en France, il faut s’attaquer aux dividendes gigantesques versés par les entreprises aux actionnaires (180 milliards) et aux intérêts qu’elles paient aux banques (67 milliards), soit 247 milliards de coût du capital financier contre 177 milliards de cotisations sociales versées. Chez Nokia, la volonté de vouloir doubler le niveau des dividendes pour les actionnaires d’ici 2020 est suicidaire alors que le groupe a déjà versé plus de 1 milliard de dividendes aux actionnaires en 2018 après 1,8 milliard en dividendes et rachats d’actions en 2017 et 4,4 milliards en 2016.

Cette logique va à l’encontre de l’efficacité sociale. Il faut mettre fin à cette spirale dépressive. Les politiques de baisse du coût du travail de l’Union européenne, de Macron, Hollande, Sarkozy et les autres sont mortifères pour les entreprises. Ce n’est pas au coût du travail mais au coût du capital qu’il faut s’attaquer.

Au lieu d’appuyer la spéculation et les revenus des actionnaires, l’Europe et la Banque centrale européenne (BCE) doivent appuyer les investissements et R & D qui développent les entreprises dans les territoires et qui créent des emplois.

 

 

 

Natixis – BPCE : un enjeu national et européen !

 

Le groupe BPCE a été constitué en 2009 par Nicolas Sarkozy à partir de différentes entités publiques regroupées dans Natixis (Crédit National, Banque française du Commerce extérieur, activités de marchés de la Caisse des dépôts) ou mutualistes (Caisses d’épargne banalisées depuis 1999, Banques populaires) pour en faire un acteur de la mondialisation financière sur le modèle des banques privées, dans le plus pur style capitaliste.

Sa direction actuelle fait un pas de plus dans la financiarisation. Elle demande aux entités mutualistes du groupe (Banques populaires et Caisses d’épargne) de dégager des fonds pour permettre à la maison-mère de prendre le contrôle direct des activités de financement spécialisé de Natixis (affacturage, cautions, garanties, crédit-bail, crédit à la consommation…). Ainsi « allégé », Natixis pourra développer des activités particulièrement spéculatives de gestion d’actifs et acheter en Bourse, à prix d’or, des concurrents pour 2,5 milliards d’euros selon les prévisions de la direction. Au passage, les actionnaires de Natixis toucheront 1,5 milliard d’euros. Cette opération annonce-t-elle une restructuration plus vaste du secteur, au moment où les banques américaines taillent des croupières à leurs concurrentes européennes dans la banque de financement et d’investissement ?

Tout cela alors que, de l’avis de tous les observateurs, se profile une crise financière encore plus meurtrière, pour le système bancaire, que celle de 2008.

C’est de la folie !

Les salariés des entités concernés ont raison de se mobiliser. Non seulement parce que, pour financer l’opération, BPCE va faire des économies… de frais de personnel en réduisant leurs avantages sociaux et en fragilisant ceux de tout le groupe. Mais aussi parce qu’il n’y a aucun avenir, pour les grands groupes bancaires français, dans cette fuite en avant dans la financiarisation.

En cherchant des profits dangereux dans la finance de marché, les banques européennes se détournent du financement des investissements porteurs d’emplois, de création de richesse dans les territoires, de développement écologique. Elles font cela alors qu’elles vivent avec notre argent – celui de nos dépôts et celui de la Banque centrale européenne qui leur prête 700 milliards à taux nul ou négatif sans aucune condition en termes d’emplois, de création de valeur ajoutée ou d’écologie !

Ce faisant, elles contribuent à écraser les économies européennes sous le coût du capital. Contrairement aux aspirations et à l’éthique professionnelle de leurs salariés, elles sont les premières responsables du chômage, de la précarité, des délocalisations, de l’évasion fiscale. Mais il ne peut pas y avoir de banques en bonne santé dans une économie malade !

Au moment où la France se révolte contre les bas salaires, contre la dévitalisation des services publics, contre le mépris de la démocratie affiché par Emmanuel Macron, changer le comportement des banques, imposer une autre orientation du crédit est un enjeu politique vital.

C’est ce que le Parti communiste propose. Par exemple, un plan de crédits à taux zéro subventionnés, pour permettre aux TPE-PME de se développer et d’augmenter les salaires. Autre exemple, un Fonds de développement économique, social, écologique solidaire européen pour financer le développement des services publics avec l’argent de la Banque centrale européenne.

Ce texte a servi de base à un tract distribué aux salariés de Natixis dans le 13e arrondissement de Paris.

Collectif des militants communistes
des finances, de la banque et de l’assurance

 

 

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