Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Verrerie ouvrière d’Albi : le PCF propose et agit

Le 27 septembre dernier, une rencontre publique a eu lieu à Albi avec Pascal Savoldelli, sénateur communiste du Val-de-Marne, à propos de l’emploi dans le Tarn

et dans la région, et tout particulièrement à propos de la Verrerie ouvrière d’Albi, descendante de la célèbre verrerie coopérative de Carmaux défendue par Jaurès.

Cette rencontre s’inscrit dans un travail de longue durée décidé par la section du PCF d’Albi dont l’ambition est de reprendre une activité politique à l’entreprise. La Verrerie d’Albi a été la première ciblée pour son plan de déploiement, compte tenu de son caractère historique, de son ancrage dans la ville, de l’attachement de la population à celle-ci et à son avenir.

Le PCF a d’abord alors engagé des rencontres avec les syndicalistes de l’entreprise. Des rencontres préparatoires ont donné lieu à des échanges importants sur l’avenir très incertain du groupe Verallia, auquel appartient la Verrerie d’Albi. En effet, le groupe a fait l’objet d’un LBO en 2015 et le fonds d’investissement Apollo, devenu actionnaire majoritaire, a l’intention de revendre ses parts rapidement, compte tenu de sa seule ambition : la rentabilité financière. Par ailleurs, on sait déjà que le groupe portugais Ferreira Barbosa serait intéressé par le rachat de Verallia, mais pour en extraire les atouts (dont le savoir-faire) à son service.

Ce qui est en jeu pour les mois et années à venir : l’emploi et l’avenir du groupe en France et en Europe.

La CGT Verre et Céramiques a formulé des propositions pour l’avenir du groupe qui ont eu un écho important dans la presse. De son côté, le PCF d’Albi est de plain-pied dans un débat essentiel, articulant des questions économiques et politiques posées par l’avenir du groupe.

Avec la section économique, une étude rapide est produite qui permet de mettre au jour les mécanismes de ponction des richesses créées par les salariés-es pour les actionnaires du groupe Apollo et pour rembourser la dette générée par le LBO. Elle rend visible clairement le coût du capital. Nous la publions dans ce numéro. L’étude met aussi en évidence l’opacité dans laquelle les conditions de l’achat réalisé au Luxembourg, demeurent, autant pour les salariés-es et leurs élus, que pour les populations et les élus de la nation, malgré la participation de BPI France (Banque publique d’investissements) qui est devenue à ce moment actionnaire à hauteur de 10 %. Enfin, l’étude permet de construire des propositions d’alternatives économiques pour reconquérir un avenir viable du groupe une fois débarrassé de la prédation du fonds Apollo. L’idée est de profiter de ce changement à venir pour imposer un nouveau montage économique possible qui promeuve une nouvelle logique économique.

Ces propositions s’appuient sur un montage vertueux, dont la logique serait la création de valeur ajoutée et son utilisation au service de l’emploi, de la formation, du développement économique des régions et de l’investissement dans la recherche, en liaison avec les grands enjeux écologiques et le rôle que les emballages en verre pourraient jouer dans ce domaine.

Le jour de l’initiative publique, les syndicalistes de l’entreprise ont permis une visite de celle-ci à Pascal Savoldelli qui a pu apprécier la modernité de l’entreprise, les conditions de travail des salariés mais aussi l’attitude réactionnaire de la direction qui prétendait lui interdire la visite, considérant qu’un élu de la nation n’a pas à s’ingérer dans les affaires d’une entreprise privée. Aussi, Pascal Savoldelli a-t-il posé la question de l’utilisation du CICE dont bénéficie l’entreprise, question qui n’a pas de réponse à ce jour.

Mais l’essentiel s’est évidemment joué ailleurs. En effet, pour préparer la rencontre publique, un 4 pages portant sur nos propositions a été diffusé sur la zone d’activité et dans l’entreprise. Puis, une une délégation du PCF (du Tarn, de la section d’Albi, Anne Lafaurie pour la commission économique et Pascal Savoldelli) avec les représentants syndicaux CGT de l’entreprise.

A cette occasion, ceux-ci ont manifesté leur appréciation positive de l’initiative du PCF.

Ils ont souligné que les propositions formulées par la commission économique du parti diffusées dans l’entreprise ont reçu un accueil positif, d’abord parce qu’elles témoignent d’un réel intérêt du Parti communiste pour les salariés-es, ce qui n’est pas le cas des autres partis politiques qui se sont contentés de paroles mais sans aucun acte concret. C’est d’ailleurs le cas avec Macron qui a visité l’entreprise pendant sa campagne (lui d’ailleurs dans ce contexte a obtenu le droit de visiter l’entreprise !). Néanmoins, ils ont aussi témoigné d’un doute persistant et réel à l’égard des politiques en général, et de la politique, singulièrement à partir du fait que la politique semble totalement impuissante face aux pouvoirs énormes de la finance.

Le débat, autant dans l’entreprise que dans la rencontre publique qui se tenait dans la zone d’activité le même jour, a porté sur ces questions. Et l’apport de notre parti et de notre sénateur sur l’articulation entre les objectifs de lutte concrète pour l’entreprise et une conception de la société, avec un rôle tout à fait nouveau des salariés-es et des populations a suscité un intérêt réel, en posant les bases d’une intervention ciblée et efficace.

Le fait de formuler des propositions économiques précises pour l’avenir du groupe, à partir de l’analyse des méthodes de prédations du fonds Apollo sur les richesses créées par les salariés-es du groupe, a permis d’aborder frontalement d’une part ce que veut dire concrètement le coût du capital pour une entreprise et pour les régions. D’autre part, la définition d’objectifs précis pour reconquérir une entreprise productive efficace et utile pour les salariés et les populations a montré qu’on peut agir au plan économique par volonté politique.

Certes, organiser la lutte sur ces objectifs demeure une question chargée d’incertitudes. Mais le fait qu’il n’y a pas de solutions clé en main aujourd’hui dans le cadre de ce système oblige à réfléchir à la manière de construire un rassemblement efficace pour se faire entendre. « On est dans une période de scepticisme massif où l’action politique provoque l’écœurement. Notre volonté, c’est de redonner confiance aux gens dans leurs propres capacités à imaginer l’avenir », insistait Pascal Savoldelli, lors de la conférence de presse donnée dans la matinée précédant l’initiative dans l’entreprise et la rencontre publique. Cette phrase fut relevée par la presse locale, qui ne s’est pas trompée sur la portée de notre ambition et celles de nos propositions. Elle a d’ailleurs relevé que nous ne nous contentons pas de proposer une nationalisation. L’article souligne que : « l’idée c’est que le groupe Verallia peut acquérir son indépendance… en partant du projet industriel et en se dégageant de la démarche spéculative ». En effet, nos propositions montrent qu’il faut un crédit accordé par une ou plusieurs banques publiques ou privées, pour financer le rachat par Verallia France des actions détenues par Apollo à travers Verallia Packaging.

Pour faciliter l’opération, le taux de ce crédit pourrait être réduit par une bonification d’intérêts versée par les collectivités territoriales concernées (en principe, la région, collectivité compétente en matière d’interventions économiques). C’est le principe des fonds territoriaux pour l’emploi et la formation proposés à l’article 10 de la proposition de loi « entreprises et territoires ».

Il est désormais public que le groupe Verallia peut s’extraire de la pression du capital et des critères de celui-ci.

La présence à 10 % dans le capital et le rôle de la BPI dans Verallia ont été discutée s: c’est une banque publique mais dont on voit qu’elle fonctionne sur les mêmes critères que ceux du capital. Cependant, réorientée, elle peut devenir un levier pour un nouveau type de développement du groupe industriel. Cela peut se réaliser avec l’intervention des salariés-es et des populations. Idem pour la Caisse des dépôts… Pour le moment, il a été souligné largement que la BPI doit des comptes de transparence aux salariés-es du groupe ainsi qu’aux populations et leurs élus. La décision a été prise de l’interpeller en région, par les représentants de la CGT dans ses commissions régionales d’orientation partout où des entreprises du groupe existent, et au plan national par l’intermédiaire de Pascal Savoldelli. L’interpellation porte sur le montage du LBO, les banques qui y ont participé, quelles parts elles devraient prendre quand le LBO sera débouclé, et le montant de la dette en cours.

Ainsi, à partir de ces multiples questions, l’enjeu de la conquête des pouvoirs nouveaux des salariés-es et des populations sur les entreprises et les banques (publiques ou privées) a pris un relief concret. Le lien avec le projet politique du PCF de sécurisation de l’emploi et de la formation est devenu plus clair dans la discussion.

Ainsi, il a été réaffirmé que le projet industriel relève de l’intervention des salariés-es à partir de leur expérience et leurs savoir-faire. Il s’agit de l’articuler aux exigences d’améliorations des conditions de travail, de rendre tous les sites pérennes, ainsi que de développer des partenariats industriels pour développer la production en France et en Europe.

Nos propositions s’articulent autour de propositions de loi déposées : « loi Chassaigne » concernant la sécurité d’emploi et de formation, ou en cours d’élaboration : loi d’expérimentation « entreprises et territoires », qui propose d’articuler l’entreprise et le territoire, à partir d’une notion d’entreprise menacée, ce qui est de fait le cas du groupe et de la verrerie, en s’appuyant sur la possibilité d’expérimentation qui existe depuis 2004. Dans les deux cas, il s’agit de promouvoir de nouveaux critères de gestion des entreprises, fondés sur l’amélioration des conditions de travail, d’emplois de rémunérations ainsi que le développement économique des territoires assortis de pouvoirs nouveaux pour les salariés et les populations avec leurs élus. Il s’agit de promouvoir une tout autre conception du développement économique fondé sur la promotion des salariés, l’économie en capital fixe et de capital financier.

Concrètement, pour la verrerie et le groupe, ces critères doivent prédominer dans les solutions après Apollo et ceux-ci devront aussi guider les relations avec l’ensemble des partenaires de l’entreprise pour développer une nouvelle vitalité économique sur les territoires concernés par le groupe.

La priorité doit devenir l’emploi et la qualification des salariés dans le groupe et les partenaires et fournisseurs et non la rémunération des actionnaires.

Des propositions précises pour des convergences de luttes

Et sur ces objectifs, les convergences de lutte peuvent se construire de façon efficace. C’est sur ces éléments que la question du rassemblement politique a pris alors tout son sens. Ainsi, cette initiative a aussi montré combien le politique et l’économique sont intimement liés, et qu’il est possible d’agir sur ces questions, si on cherche à s’en emparer.

Elle a aussi permis de mesurer l’importance du déploiement précis du PCF en direction des entreprises et du rôle essentiel que notre parti peut jouer, en s’appuyant sur nos atouts, le rôle de nos élus, l’action de la commission économique, l’action du Parti sur le terrain, tout autant pour proposer des solutions, organiser l’action et construire sur les bases de classe, un rassemblement populaire qui devienne incontournable. Elle a mis en lumière aussi le besoin de formation pour les militants communistes sur ces questions afin que nous soyons plus forts pour intervenir dans le champ de l’entreprise. Il est d’ailleurs utile de dire ici qu’à l’issue du débat public, le livre 7 leviers pour prendre le pouvoir sur l’argent de Denis Durand (éditions du Croquant, Paris, 2017) a été commandé pour être diffusé.

Cette initiative est, évidemment, un commencement ; rien n’est joué mais des pistes concrètes de lutte sont posées. La reprise de l’activité du Parti vers les entreprises a permis aux militants communistes d’Albi et du Tarn de prendre l’offensive, bien en amont des futures décisions sur le groupe. Ainsi, la lutte devient offensive, elle s’engage sur de nouveaux critères de gestion, sur un rôle nouveau des instruments bancaires, jusqu’à la BCE. Elle permet alors d’établir le lien entre les questions concrètes des salariés-es et les choix politiques à mettre en œuvre, ainsi que le rôle de notre parti effectif.

Un effort à poursuivre et à multiplier sans aucun doute ! 

 

En M€

2015

2016

Chiffre d’affaires

103

115

Achats de marchandises

15

28

Achats de matières premières

18

18

Autres achats et charges externes

35

31

- Consommations intermédiaires

67

78

% du CA

65%

66%

= Valeur ajoutée

35

36

 

 

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