Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Faire de la politique à l’entreprise (Dossier)

Faire de la politique dans l’entreprise, pourquoi ? Pour revenir à une vieille tradition communiste ? Parce que la machine à café est un lieu où on peut parler aux citoyens ? Aucune de ces raisons ne justifierait que ce sujet ait été inscrit à l’ordre du jour du congrès du PCF.

Ce qui en fait un enjeu politique majeur, en ce début du XXIe siècle, c’est que l’entreprise est plus que jamais un enjeu politique et culturel qui structure les politiques économiques, une institution où se jouent des batailles de pouvoir déterminantes et où se structurent les idées politiques et les comportements électoraux. Comme l’écrit la base commune à partir de laquelle les débats préparatoires au congrès ont eu lieu, « l’entreprise est un lieu décisif de la lutte de classes. Lieu de pouvoir sur l’économie, la société et la vie quotidienne, c’est aussi un lieu où le patronat peut imposer ses idées. Un lieu où se forge un vécu d’expériences et des mentalités sur lesquelles peuvent s’imposer les idées dominantes comme se construire une conscience de classe.

C’est si vrai que les gouvernements successifs, dans le sillage du Medef, n’ont cessé de faire de l’entreprise la pièce centrale de leur politique, cherchant ce que Hollande a pu qualifier de « compromis historique » de soumission des salariés et de la société aux objectifs patronaux. Avec Macron, ce chantier prend une bien plus grande ampleur en visant une destruction sans précédent des acquis sociaux, tout en cherchant à intégrer le plus possible le salariat à ses choix politiques à partir de l’entreprise.

Pour libérer la politique de la dictature du marché, il faut une appropriation sociale effective des entreprises et des banques, et de toutes les institutions qui leur sont liées. De même que nous n’entendons pas déléguer la politique et l’intérêt général au sommet de l’État, nous devons refuser de déléguer la gestion des entreprises, avec la production des richesses, aux capitalistes. La séparation entre l’économie et la politique est au cœur du capitalisme et de ses aliénations. Nous voulons la dépasser.

Il est donc vital de relancer réellement, sans se contenter de promesses de congrès, la vie du parti et le combat organisé si indispensables dans les entreprises et autour d’elles. C’est aussi la condition pour faire progresser une conscience de classe et une unité politique du salariat dans sa diversité, sur l’ensemble des enjeux qui le concerne, dans l’entreprise comme dans la cité. »

Après une longue période où la modification du système productif, la diversification du salariat, l’évolution des conditions de vie, les difficultés mêmes rencontrées par le syndicalisme, ont pu paraître justifier un abandon de l’entreprise comme terrain concret de la bataille politique, plusieurs signes indiquent des évolutions nouvelles significatives. La place que les débats du Parti communiste donnent à son organisation dans l’entreprise en est un. Le besoin exprimé dans le mouvement syndical en est un autre, comme le montre la prise de position de Laurent Brun que nous reproduisons dans les pages qui suivent. C’est aussi ce qui ressort du débat entre une dirigeante syndicale, Valérie Lesage, un responsable politique, Igor Zamichiei, et le président des parlementaires communistes à l’Assemblée nationale André Chassaigne, dont nous publions également le compte rendu.

Les batailles politiques dans l’entreprise ne peuvent être gagnées que si elles s’appuient sur des idées solides, sur un réarmement idéologique assez fort pour tenir tête à l’idéologie patronale et aux prétentions hégémoniques des doctrines néolibérales dont Emmanuel Macron se fait un ardent propagateur. Par exemple, c’est une grande force que de s’appuyer sur la cohérence entre objectifs sociaux, mobilisation des moyens financiers et conquête de nouveaux pouvoirs des travailleurs à cet effet. C’est une grande force de pouvoir briser le tabou du coût du capital pour faire percevoir qu’il existe des alternatives aux gestions patronales pilotées par la dictature des marchés financiers. L’article de Claude Laridan montre que des idées d’avant-garde – la lutte pour de nouveaux critères de gestion entrant en conflit avec les critères capitalistes fondés sur le calcul du taux de profit, de la rentabilité du capital – peuvent trouver une traduction concrète, comptable, au service des luttes syndicales et des mobilisations politiques dans les entreprises et dans les territoires1. La bataille engagée par les communistes d’Albi pour l’avenir de la Verrerie ouvrière et du groupe Verallia auquel elle appartient aujourd’hui s’appuie sur ces outils. Cela montre la fécondité d’une conception cohérente du dépassement, progressif mais effectif, du capitalisme, telle que l’exprime la proposition de loi sur la sécurité de l’emploi et de la formation et sa déclinaison dans le projet de proposition de loi d’expérimentation « entreprises et territoires », dont nous publions la dernière version, modifiée à la suite de confrontations avec de multiples acteurs depuis six mois.

AU SOMMAIRE

- Syndicaliste et communiste par Laurent Brun 

- Du nouveau dans les relations  entre syndicalisme, bataille d’idées et parti politique révolutionnaire par André Chassaigne, Valrie Lesage, Igor Zamichiei

- Comptabilité et nouveaux critères de gestion par Claude Laridan

Verrerie ouvrière d’Albi : le PCF propose et agit par Anne Lafaurie 

Quel projet pour le groupe Verallia et pour ses territoires ? par Anne Lafaurie

- Projet de proposition de loi d'expérimentation 

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