D’énormes masses de fonds ont été injectées par la Banque centrale européenne et aussi par l’État avec son endettement, pour soutenir les banques et l’activité capitaliste. Mais cela, pour relancer les mêmes gestions et politiques, favorisant la rentabilité financière et non la vie des populations, comme on veut le faire encore avec le Grand Paris Place financière.
Aussi, tandis qu’une rechute ultérieure plus grave se prépare, la reprise de la croissance est faible. Elle est accompagnée de la persistance du chômage massif et de la précarisation des emplois, des pressions sur les dépenses publiques sociales en opposition aux besoins formidables d’expansion des services publics.
Ces besoins sont liés à la révolution technologique informationnelle, aux exigences écologiques sans précédent, et aussi aux révolutions parentales (avec l’émancipation des femmes), à la révolution démographique (de la longévité et du vieillissement), à la révolution migratoire des populations du Sud vers le Nord, etc.
En outre, les dépenses accrues pour les services publics peuvent contribuer à une demande importante pour les productions et donc à soutenir l’emploi suffisamment, malgré les pressions d’économie de travail de la productivité croissante.
On devrait articuler les luttes de défense de services publics et pour de premières réponses aux besoins urgents, à des avancées vers une promotion sans précédent des services publics pour une meilleure vie sociale et comme solution fondamentale à la crise du capitalisme.
Pour les services publics existants, on assiste à la marchandisation, la privatisation, l’ouverture à la concurrence, l’emprise de la rentabilité financière sur les gestions, aux pressions contre les dépenses, avec notamment la volonté de suppression d’un poste de fonctionnaire sur deux partant à la retraite, aux pressions sur les conditions de travail. Mais ces régressions fondamentales s’appuient sur les conditions nouvelles au plan technique et sur certaines progressions particulières. Aussi, les luttes de résistance des usagers et des personnels doivent s’appuyer sur les aspirations et besoins nouveaux, pour des avancées alternatives allant vers des transformations radicales de progrès. En effet, les régressions et les privatisations tendent souvent à répondre à la montée considérable, mais jugée intolérable pour l’État, des besoins et des dépenses nécessaires. Alors que cela exigerait d’autres types de financement et d’efficacité des dépenses. Ainsi, en France, les dépenses de santé, publiques et privées, sont passées, en raison notamment des exigences du progrès technique des thérapies ou encore des besoins du vieillissement, de 5,6 % du PIB en 1970, à 9,1 % en 1991 et environ 11 % en 2008. Cependant on s’efforce de fermer des hôpitaux publics de proximité pour favoriser les groupes privés et on augmente les dépenses pesant sur les ménages, aux ressources limitées. Entre 2001 et 2009 le budget santé des ménages aurait augmenté de 40 %, tandis que les dépenses de santé seraient couvertes à 76,9 % par la Sécurité sociale, à 13,7 % par les complémentaires privées, à 9,4 % directement par les ménages.
La promotion des services publics concernait bien sûr les services classiques : l’éducation, face notamment à la réforme des lycées, à celle de l’enseignement supérieur et de la recherche ; la santé, avec notamment la riposte au projet de réforme et de réduction des hôpitaux publics, le logement social, aux insuffisances considérables, le transport, notamment les transports régionaux de voyageurs, la poste, la recherche publique.
Cependant, on viserait aussi des transformations fondamentales, comme avec un service public de sécurisation de l’emploi et de la formation, ou avec un nouveau service public du crédit (depuis des Fonds publics régionaux, un Pôle public financier national, une autre BCE, qui pourrait être articulée à un FMI refondu), un service de planification stratégique et incitative, décentralisée, pour la politique industrielle et de services et pour de nouvelles gestions, un service d’incitation à des coopérations internationales pour le codéveloppement.
On instituerait enfin des services tout à fait nouveaux : pour l’écologie, pour la petite enfance, pour les personnes âgées (bien au-delà de la seule dépendance).
L’ampleur des besoins de financement renvoie d’abord à des prélèvements publics et sociaux accrus, à l’opposé de leur réduction pour les riches et pour les entreprises, comme avec la suppression de la taxe professionnelle pour les collectivités territoriales contre leur apport aux services publics. Cet accroissement irait de pair avec des variabilités incitatives : relèvement de l’impôt sur le revenu pour les couches les plus riches, élévation de l’impôt sur les sociétés, d’autant plus que le bénéfice n’est pas utilisé pour l’investissement réel, élévation des cotisations sociales patronales, d’autant plus que les dépenses salariales sont faibles en pourcentage de la valeur ajoutée, par rapport à la moyenne de la branche. Mais l’augmentation très importante des dépenses des services publics peut aussi s’appuyer sur une modification des règles de la Banque centrale européenne. Celle-ci devrait prendre des titres de dette publique grâce à sa création monétaire, à l’instar de la Federal Reserve des États-Unis ou de la Banque d’Angleterre, mais avec affectation aux différents services publics. Cette question très importante de la création monétaire est largement méconnue ou négligée.
Une transformation fondamentale, de portée révolutionnaire, devrait concerner les pouvoirs. Cela se rapporte à de nouveaux pouvoirs de coopération créatrice des usagers, directs ou indirects comme les parents, avec tous les personnels. Ainsi, un malade à l’hôpital, au lieu d’être traité comme un objet passif, devrait pouvoir participer de façon créatrice à son propre traitement, avec l’aide d’associations, de formation, de sites d’information, etc.
Cette coopération des usagers avec tous les personnels irait de pair avec le développement des pouvoirs de tous les personnels et de leur formation. Cela contribuerait à l’émancipation des pouvoirs directoriaux eux-mêmes soumis aux pressions étatistes, bureaucratiques et technocratiques, notamment de la part des agences gouvernementales, et aux pressions des entreprises privées. Ce développement non étatiste, avec de très nouveaux pouvoirs de tous les concernés, fait qu’on pourrait peut-être parler de « services publics et communs ».
Les exigences nouvelles des calculs et indicateurs de résultats dans les services publics répondent aux pressions du rationnement et de la rentabilité financière. Mais elles correspondent aussi à des besoins novateurs d’efficacité. D’où la possibilité d’élaborer de nouveaux critères d’efficience sociétale, de nouveaux instruments de mesure et indicateurs. Cela participerait à des transformations des opérations, à la montée de la créativité, de la prévention, des coopérations, en particulier avec les entreprises et avec les autres services publics, des plans local et national jusqu’aux plans zonal et mondial.
Ces coopérations internationales renvoient à l’instauration de services et biens communs publics de l’humanité. Les biens publics mondiaux ont été mis en avant par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). On emploie aussi de plus en plus l’expression de « Biens communs de l’humanité ». Cela comprend l’environnement, la santé, la culture, l’eau, l’alimentation, l’énergie, des transports, les communications, l’éducation, la science, la formation, mais aussi la paix. Et ils comprendraient encore, selon nous, la monnaie et la finance partagées, ou l’emploi et le codéveloppement des peuples.
Il ne faudrait pas céder à une vision idéalisée des biens communs, sous-estimant les efforts de récupération dominatrice des entreprises multinationales, comme avec les propositions d’un « capitalisme vert », ni les exigences de lutte de classes et de masse, du local au mondial, comme à propos de l’eau. Avec les avancées pour instituer des Services et Biens Communs publics de l’humanité, il s’agit de faire reculer les accaparements et les gâchis des multinationales et des États dominants. Cela se réfère notamment, à des compromis évolutifs pour des modifications des activités des multinationales. Cela concerne aussi l’imposition de normes sociales, écologiques, culturelles et de pouvoirs d’intervention démocratique, du local au mondial, pour avancer vers une autre civilisation.
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