Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

Economie et Politique - Revue marxiste d'économie
Accueil
 
 
 
 

Industrie : moteur de croissance et d’avenir Rapport du CESE

Lors de sa plénière du 27 mars, le CESE a adopté un avis portant sur l'industrie par 142 pour, 21 contre et 2 abstentions. Son titre : Industrie: un moteur de croissance et d'avenir. Présenté par Marie-Claire Cailletaud, représentante de la CGT et rapporteure au nom de la section des activités économiques, ce rapport analyse les raisons de l'affaiblissement industriel en France et se prononce sur la nécessité économique de promouvoir une industrie robuste pour le pays, imbriquée avec les services, sachant tirer partie des potentialités de la révolution numérique, répondant aux défis climatiques et aux aspirations des salariés et citoyens, ainsi qu'aux transformations anthropologiques du travail qui s'opèrent et impactent l'industrie et son avenir. Pour la rapporteure, la France a besoin d'une vision et d'une programmation industrielle de long terme, et de porter à l'échelle européenne un besoin de coopération fort ainsi qu'une stratégie communautaire de développement. Un rôle que l’État doit pouvoir incarner. A partir d'une approche de l'industrie en tant que système productif global, le rapport souligne l'importance des écosystème territoriaux, de la formation pour élever les qualifications, de la recherche, des moyens financiers et de la construction d'un projet d'avenir partagé. Et pour cela, le rapport formule une série de recommandations. On retrouvera le rapport dans son intégralité et ses préconisations à l'adresse :
<http://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Rapports/2018/2018_07_industrie_croissance_avenir.pdf>.

Pour sa part, Économie et Politique a choisi de publier l'explication de vote sur l'avis de Frédéric Boccara, membre du CESE et de la section économique au titre des personnes qualifiées.

 

Explication de vote sur l’avis du CESE

Frédéric Boccara

 

« Nous nous prononçons sur ce que je considère être un bon avis. Porteur de sens et de recommandations fortes.

Je le voterai.

Un. Il positionne l’industrie comme une activité reliant la nature et les êtres humains.

Manière de dire : on ne peut pas traiter d’écologie sans traiter d’industrie, ni de capacités humaines et de travail.

Deux. Il cible les défis modernes, tout particulièrement la révolution écologique et le défi de basculer notre modèle productif vers le développement systématique des capacités humaines. Cela renvoie à ce que j’appelle avec d’autres la révolution informationnelle.

Trois. Ceci est fait sans éviter le « dur du dur » de l’économie, les coûts. L’avis énonce que, pour cela, alors que l’industrie française a connu un fort recul dont témoigne notre déficit commercial aggravé et le recul ou la précarisation de l’emploi industriel, il faut desserrer les contraintes financières, l’étau de la culture de la rentabilité financière et ce qui va avec. Il aborde donc – cela n’allait pas de soi – les institutions concernées :

– les banques et leur crédit, avec deux recommandations importantes ;

– la n° 8 sur le financement des PME, insiste sur l’orientation des Fonds régionaux vers les projets développant la valeur ajoutée (VA) dans les territoires, une idée transversale partagée par l’avis que j’ai porté sur les PME ;

– la n° 9 sur BPI-France avec le besoin – je cite – de « différencier plus nettement ses critères d’intervention des critères financiers traditionnels » et l’avis relève que cela doit concerner l’ensemble du système financier.

L’avis s’inscrit ainsi en forte continuité avec les travaux du CESE (les avis comme les Rapports annuels sur l’état de la France).

Seconde institution abordée, l’État et ses aides publiques. L’avis propose une évaluation des aides à la R & D… et une philosophie : les centrer sur leur effet concret (valeur ajoutée et effet national, ou européen). (Recommandation 5). La recommandation 18 va dans le même sens expliquant : « les incitations fiscales devraient être subordonnées […] à la prise en compte de l’intérêt général tel la politique d’emploi, de formation, de R & D ».

La valeur ajoutée apparaît comme un des points de convergence et d’appui progressiste et moderne pour construire des avancées communes.

Quatre. L’avis traite à juste titre de tissu industriel et d’écosystème. Trois éléments :

- Les sous-traitants et la responsabilisation des grands groupes. C’est la recommandation 7.

- Le rôle décisif et nouveau de la formation, et ses implications à la fois financières et institutionnelles (recommandation 6), dans le sens de ce que j’appellerais – avec mes amis – une sécurité d’emploi et de formation.

- Enfin, l’industrie est reliée aux services,

- Les services de type industriel, comme la recherche, ces deux activités ne devant pas être désarticulées. C’est une chose décisive aussi bien pour l’emploi que pour une véritable maîtrise sociétale.

- Les services publics d’appui, qui ont aussi un rôle déterminant à jouer. Pour moi, c’est fondamentalement le service rendu, la valeur d’usage qui devrait piloter l’ensemble.

Cinq. L’avis apporte sa pierre originale à ce que doit être une politique industrielle. Nombre de mes collègues économistes pourraient utilement en prendre connaissance en ce sens.

La politique industrielle est traitée au niveau européen et national. C’est une bonne chose.

Je partage pleinement l’idée de service public européen de la donnée.

Je partage aussi celle PPI, programmation pluriannuelle de l’industrie, incluant les financements autant que la formation, les infrastructures ou la recherche, et un volet spécifique relatif à la consommation de ressources et de matières.

Enfin, je salue l’alerte finale de l’avis sur le défi de guerre économique mondiale et les exemples préoccupants de prédation financière possible ou en cours : Alstom et son TGV, Général Electric et l’énergie, Airbus. L’État ne doit pas laisser faire cela ! Des mobilisations sont en cours. Nous devrions y être attentifs.

Décidément, on ne peut se payer de mots sur les enjeux sociaux, écologiques et de maîtrise, sans parler industrie, finance, connaissances, formation et travail.

Et c’est très bien. » 

 

Il y a actuellement 0 réactions

Vous devez vous identifier ou créer un compte pour écrire des commentaires.